La "didacticité" des discours des littéraires sur l'enseignement des lettres

Depuis une dizaine d’années, plusieurs spécialistes des études littéraires ont publié des ouvrages sur l’avenir de celles-ci et la « crise » qu’elles semblent connaitre actuellement. On citera notamment, parmi ces ouvrages, ceux de Paul Aron et Alain Viala (L’Enseignement littéraire, 2005), d’Yves Citton (Lire, interpréter, actualiser. Pourquoi les études littéraires ?, 2007 et L’Avenir des Humanités. Économie de la connaissance ou cultures de l’interprétation ?, 2010), de Vincent Jouve (Pourquoi étudier la littérature ?, 2010) ou encore de Jean-Marie Schaeffer (Petite écologie des études littéraires. Pourquoi et comment étudier la littérature ?, 2011). Ces travaux de type programmatique portent certes majoritairement sur l’enseignement de la littérature à l’université, mais ils contiennent également des propositions relatives à l’enseignement secondaire. De quelle nature sont ces propositions ? Dialoguent-elles avec des recherches didactiques ? Quelles sont leurs conceptions de l’enseignement, de l’apprentissage et de l’école ? Si l’on peut émettre l’hypothèse, en première approche, que ces réflexions nient – ou, plus exactement, ignorent – les recherches en didactique, elles constituent cependant des objets de recherche pour la didactique du français. En effet, elles proposent une « didacticité » (Moirand, 1992 ; Laurent, 2014) de leur objet d’étude premier (la littérature), soit une forme de diffusion du savoir et de programmation d’un enseignement provenant d’un espace discursif extérieur à celui de la didactique et des politiques d’enseignement. Elles interfèrent dès lors avec le discours de la didactique, en intervenant dans un champ discursif polémique fait de propositions de réformes de l’enseignement. On se propose d’étudier le fonctionnement de ces discours, en insistant plus particulièrement sur leurs formes de didacticité et leurs rapports, réels mais implicites, avec les recherches actuelles en didactique (avec les recherches en didactique contemporaine). L’enjeu d’une telle approche est moins de répondre directement à la question des influences des recherches en didactique sur d’autres champs de recherche – en l’occurrence, les études littéraires – que de réfléchir à la façon dont s’organisent (et, parfois, se chevauchent) les frontières entre disciplines. Il s’agira de comprendre comment fonctionnent ces discours aux marges du champ didactique et d’en faire un objet d’une didactique pensée comme une étude des formes d’enseignement et d’apprentissage (scolaires et non-scolaires). Bibliographie indicative ARON, P., & VIALA, A. (2005). L’Enseignement littéraire. Paris : PUF (Que sais-je ?). CITTON, Y. (2007). Lire, interpréter, actualiser. Pourquoi les études littéraires ? Paris : Amsterdam. CITTON, Y. (2010). L’Avenir des Humanités. Économie de la connaissance ou cultures de l’interprétation ? Paris : La Découverte. JOUVE, V. (2010). Pourquoi étudier la littérature ? Paris : Armand Colin. SCHAEFFER, J.-M. (2011). Petite écologie des études littéraires. Pourquoi et comment étudier la littérature ? Vincennes : Thierry Marchaisse. MOIRAND, S. (1992). Autour de la notion de didacticité. Les Carnets du Cediscor, 1. LAURENT, J.-P. (2014). Didacticité. In J. Van Beveren (éd.), Littérature, langue et didactique. Hommages à Jean-Louis Dumortier (pp. 109-127). Namur : PUN. Ouvrages de synthèse sur la didactique Daunay (B). 2007. « Etat des recherches en didactique de la littérature ». In Politique et rhétoriques de l’ « Ecole juste » avant la Cinquième République. Petitjean (A). 2014. « 40 ans d’histoire de la « lecture littéraire » au secondaire à partir de la revue Pratiques », Pratiques, 161-162, 2014, « Ecrire/faire écrire »